La poésie d’Ariane Tapp, de la tendresse à l’écorchure

Par Geneviève Lévesque
Publié le 26 octobre 2017
ARIANE TAPP
Ce qui ne peut se défendre
Éditions du Sablier
71 pages, 2017

Ariane Tapp, boursière de la mesure Première Ovation de la Ville de Québec, a récemment publié son premier recueil de poésie, Ce qui ne peut se défendre, aux éditions du Sablier. Or, c’est le lecteur qui ne peut se défendre, saisi comme il l’est dès les premiers mots par une écriture précise dans l’image comme dans l’expression des états d’âme.

Non, le lecteur, la lectrice ne sait pas se défendre de plonger dans les images  finement ciselées. On est transporté dans le monde intérieur de la poète qui « épluche des quartiers de silence », cherchant à « ramener la première neige ».

Ne pas se défendre d’entrer dans ce monde où l’amour a la belle part : « tu sais je me perds si facilement / je n’ai toujours vu que le ciel / dans tes yeux ». On se laisse entraîner par ce désarmement de l’être, livré tout entier à l’autre, sans défense. Et pourtant l’amertume ne cesse pas. On se demande pourquoi elle insiste, jusqu’à ce que, peu à peu, on soit convié à une sorte de dépouillement. Si l’amour refait surface régulièrement, quelque chose de plus solide mais aussi de plus dur se manifeste dès le début.

Ne pas se défendre alors d’un certain malaise doucement tissé, à peu de mots, au-delà du vertige de l’amour, ramené à l’angoisse, à la brutalité même, une brutalité comme des coups de couteaux qui lacèrent le texte. À répétition. Car « la cicatrisation m’ennuie / je préfère les blessures vives / j’ai toujours aimé déchirer / ce qui ne peut se défendre », écrit la poète.

Les mains de l’amant reviennent tel un leitmotiv, donnant le ton du moment : « j’aurai lâché ta main / me serai noyée / dans tout ce que je n’ai pas dit ». Plus loin ces mains seront perdues, puis mortes : « où sont mortes tes mains / murmures / qui me disaient / ne sombre pas ». C’est la poète qui rêve à la mort, à s’oublier elle-même en cédant à la tentation de « fracasser les jours ». Au dernier vers, « la pluie remonte vers le ciel » ce qui laisse supposer que la poète remonte, elle aussi, de cette difficile épreuve qui reste un égarement plus qu’une recherche : « je ne sais pas / à quelle lumière me raccrocher / et si tous les soleils se valent ». C’est ce qui persiste de ce recueil au-delà de la lecture, le sentiment de chercher ce qui ne se trouve pas, avec une infinie patience.

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