Les dettes des personnes assistées sociales envers l’État

Par Andréann Poirier
Publié le 18 février 2023
Renée Dubeau lors du lancement du dossier à la Ruche Vanier. Photo: DDP

C’est le lundi 13 février dernier, au local de la Ruche Vanier, qu’a eu lieu le lancement du « Comment financer un programme une dette à la fois – les évasions fiscales pour les riches, les invasions fiscales pour les pauvres » de l’ADDSQM (l’association pour la défense des droits sociaux Québec métropolitain).

Fruit de trois ans de travail engagé auprès de personnes qui sont aux prises avec la même problématique, ce dossier-choc prend la forme d’un recueil de témoignages poignants qui a pour but de lever le voile enfin sur une dure réalité que le politique comme le médiatique cherche depuis longtemps et ce, par tous les moyens, à occulter : l’endettement des personnes qui vivent grâce aux revenus de l’assistance sociale.

Attention, ici, on ne parle pas de prêts contractés auprès d’institutions financières, de soldes de cartes de crédits impayés, ni de dettes de jeu, mais bien de dettes envers le gouvernement, le Ministère de la Solidarité lui-même, qui se garde le droit de réclamer et de prélever des montants astronomiques aux personnes à qui il vient en aide et ce, pour des raisons complètement bidons.

L’émotion était palpable en cette soirée de lancement où étaient présents bien sûr les militants salariés de l’ADDSQM à qui l’on doit ce dossier, des militantes de plusieurs autres organismes communautaires, ainsi que le député de Québec solidaire dans Taschereau, Étienne Grandmont. Ce dernier a d’ailleurs pris la parole pour saluer le travail de l’ADDSQM, en soulignant la force des témoignages contenus dans ce dossier, et l’importance de le faire connaître auprès des élus à l’Assemblée nationale. Tout en promettant de distribuer des copies de ce dossier à ses collègues de l’Assemblée, il a qualifié l’enjeu de « violence institutionnelle » faite envers les personnes les plus vulnérables de notre société. Le député, tout comme les militants, espèrent que les choses changent.

Un enjeu peu connu

Mais, de quoi parle-t-on, concrètement ? On parle d’Audrey, par exemple. Audrey, qui, après avoir rencontré des problèmes sur le marché du travail, devient prestataire de l’aide de dernier recours. Son chèque, avec lequel elle doit se loger et se nourrir pendant un mois, est de 597,29$. Quand son père décède, elle reçoit en héritage la modique somme de 2 000$. Elle ne le déclare pas, naturellement. C’est un cadeau, un don qui lui revient. Mais, l’aide sociale l’entend autrement, et il lui réclame le montant de 1 191$ qu’elle doit lui rembourser comme si cet héritage, elle le lui avait emprunté.

C’est aussi la jeune Flavie qui, à peine majeure, réussit enfin à se sortir d’une situation de violence conjugale, mais qui doit maintenant 45 000$ à l’aide sociale ! Son conjoint a décidé de se venger d’elle et de la « dénoncer » auprès du ministère, qui considère maintenant qu’elle n’avait pas droit aux prestations qui lui ont été versées pendant qu’ils étaient ensemble. Au début, la dette de Flavie était de 18 000$. À cause des intérêts, elle s’élève aujourd’hui à 45 000$.

Le problème, ce sont ces dettes que dénoncent l’ADDSQM. Des dettes qui sont d’abord « créées de toutes pièces par le ministère», selon Renée Dubeau porte-parole de l’organisme. Des dettes qui sont «soumises à la loi du marché », c’est-à-dire aux « intérêts ». Les sommes dues finissent donc nécessairement par dépasser de loin ce qui est réclamé au départ, ce qui augmente de façon tragique la détresse des personnes assistées.

Remercions donc tous en chœur l’ADDSQM, les Audrey et les Flavie de ce monde qui ont eu le courage de témoigner malgré la honte, l’isolement, les préjugés. Il est plus que temps que cesse cette pratique abusive de notre gouvernement qui, sous prétexte d’aider les gens à se sortir de la pauvreté, invente des pièges et des règles en jouant aux grands frères intimidateurs des personnes assistées. Et parions que nous ne voyons que la pointe de l’iceberg avec ce dossier…

Commentaires

  1. Je fais aussi partie de ces pauvres gens, j’ai tout perdu, tout tout perdu, ma conjointe et la belle famille qui ne peuvent accepter le fait que leur fille est aussi responsables que moi, ils ont peur de perdre la maison de leur fille auxquels ils ont signé à la banque. J’ai aussi perdu ma santé, j’ai commencé par avoir des crises d’angoisses, je perdais mon souffle, je me suis rendu en urgence à l’hôpital pour insuffisance cardiaque. J’ai été opéré au cœur au CHUM pour un changement de valve aortique. Mon cœur était vraiment triste! Ma dette au tout début était de 78,000$ et aujourd’hui elle est d’environ 92,000$ tout en donnant 200$ par mois, c’est le maximum qu’on peut donner, la vie coûte tellement plus chère, nous vivons dans la pauvreté, notre frigidaire est souvent vide et ma conjointe doit manger sans gluten qui est plus dispendieux. Donnez-moi une raison de vivre!
    Merci pour votre écoute. Pierre

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