Renauderie Le garage

Publié le 19 novembre 2013

Par Renaud Pilote

Une bordée de neige inattendue. La première. Aussitôt, le téléphone ne dérougit pas, tous voulant faire poser leurs pneus d’hiver en vitesse. « Plus de rendez-vous possible avant deux semaines malheureusement, ma petite madame. Il fallait appeler il y a trois heures. » L’équipe du garage Pelletier était pourtant si paisible avant cette débauche d’impatience, astiquant le train-train quotidien en sirotant une eau-de-vaisselle (deux crèmes, un sucre) dans des verres en styromousse. Ce jour-là, à la vue de ce gros nuage de novembre, ils avaient rempli de peanuts barbecue le distributeur mécanique et s’étaient assurés de la bonne saleté de leurs torchons : c’est dans ces petits détails que l’on acquiert la réputation de pro, ils ne le savent que trop bien. Nous, c’est le jour même du rendez-vous et on se pense bien fins d’avoir choisi ce jour-là pour y aller. Alors que Mario Pelchat s’époumone entre deux annonces de sirop pour la toux à la radio locale, Mario Pelletier raccroche le combiné et s’installe sous un éconoline jacké à six pieds dans les airs, puis tapoche d’une main ferme le tuyau d’échappement afin d’entreprendre l’inspection en 38 points achetée à 50 % par un client à l’occasion de la vente anniversaire. Stéphane Pelletier l’assiste en balançant les pneus, fraîchement permutés, de l’autre véhicule suspendu dans le garage qui abrite deux « lifts » dans la force de l’âge. Quant à lui, Michel Turgeon (un ami de la famille?) a pris le relais sur le téléphone tout en cherchant à passer une commande d’enjoliveurs usagés sur un site spécialisé. L’après-midi accumule les centimètres et de la zone d’attente, on en surprend un à siffloter avec abus de trémolo un air joyeux connu (de lui seul), nous confirmant ainsi que Pelchat pleure sa vie en vain du haut de son haut-parleur mono. Parlant de zone d’attente, pas de Martin Matte ni de Guillaume Lemay- Thivierge ici : seul un article avec Michel Barette sur « dans le temps que c’était l’fun » dans le Lundi fait office de représentant du Star Système automobile québécois. Je me rabats sur un rôti de Ricardo pendant qu’un écran plat diffuse en direct de Daytona Beach les virages à gauche d’une course de NASCAR tout aussi plate. Stéphane sort de l’antre et nous avise de but en blanc que notre galiper chie sur un temps rare. Je sais qu’il sait ce que c’est qu’un galiper et moi je sais qu’il n’est pas garanti1, alors nous obtempérons pour le changer, sans trop de dépit de notre part, car à quoi aurions-nous pensé en ayant un char… Mario nous affirme que l’auto va être correcte pour l’hiver et je le crois plus que si c’était Martin Matte qui me le disait en palindrome. Le soleil décline tranquillement sur la fin d’après-midi du quartier industriel et rien n’est trop prévu pour le souper encore. Sur le boulevard commercial, on envisage la commande à l’auto mais on se ravise : on ira à l’épicerie à pied une fois revenus au centre-ville. 1- Un classique de François Pérusse

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