L’effondrement n’aura pas lieu. Encore

Par Hélène Matte
Publié le 23 avril 2023
Robert Faguy, Le show sur l’effondrement qui n’aura pas lieu du Bureau de APA Mois Multi 2020. Photo: Émilie Dumais

En 2020, l’édition du Mois Multi, brève mais dense, s’articulait autour du thème de l’effondrement. L’idée fut d’abord tirée de l’œuvre du Bureau de l’APA. L’expo sur l’effondrement qui n’aura pas lieu qui ouvrait alors ce mois d’arts multidisciplinaires, et servait, deux jours plus tard, de décor pour Le show sur l’effondrement qui n’aura pas lieu.

Ce spectacle, après une tournée cahin-caha à travers le Québec et la pandémie, était de retour à Québec pour ses dernières représentations. Le 2 mars dernier, la représentation était suivie d’une cérémonie en l’honneur de Simon Drouin, membre fondateur du Bureau de l’APA, dont le décès a imprégné la création qui était présentée.

Or cet artiste multidisciplinaire brillant et généreux, connu également pour son activité dans l’Orchestre d’hommes-orchestres, a marqué le milieu des arts vivants en profondeur, au point que La Charpente des fauves et son directeur général Émile Beauchemin, ont pris l’initiative d’inaugurer en sa mémoire la salle de spectacle, qui porte désormais le nom de Simon Drouin.

C’est donc là, et non sans émotion, que cette fois le Bureau de l’APA présentait Le show sur l’effondrement qui n’aura pas lieu. Les images de L’expo sur l’effondrement, livre d’artistes combinant les écrits poignants de Laurence Brunelle-Côté et les images saisissantes de Stéphanie Béliveau tapissaient la scène. Dans cette œuvre, littéralement un livre ouvert, une sensibilité expressionniste empreinte de violence et de beauté, exhibent la fragilité comme un étendard de résistance à l’anéantissement.

Tout était donné, sans arrière scène. Les protagonistes se trouvaient dans la salle et sur scène. Complice du Bureau, le performeur Alain-Martin Richard, toujours aussi solide et inventif dans ses conférences-démonstrations, introduisait aux processus même du projet qui prenait soudain la forme d’une Assemblée générale délurée. Laurence Brunelle Côté et Julie C. Delorme étaient assises face au public, lui-même assis, en attente d’un prochain accident, décharge de sucre ou renversement. Bernard Langevin, se levant de la salle vers le micro, pour incarner l’éternel et nécessaire intervenant venant ébranler l’ordre du jour et tout remettre en question. Entre la fonte des glaciers et l’odeur du café filtre, Robert Faguy prenait le rôle du président d’assemblée blasé avant de nous servir une performance virtuose. Dans une danse funèbre et saisissant, il se métamorphosait en animal polaire avalé par le pétrole. La prouesse de présence de ce pionnier des arts multidisciplinaires, où action et contemplation étaient simultanément à leur comble, est en soi une pièce d’anthologie.

Le show sur l’effondrement qui n’aura pas lieu, refait du théâtre une agora. Il est un deuil et un puissant appel. Il est une assemblée aux procédures cathartiques dont le varia est charivari. De ce formidable bricolage de corps dans l’espace, d’objets du quotidien, de matière, de situations et d’expérimentations, le violoncelle grave et patient de Marie-Loup Cottinet résonne encore.

Commentaires

  1. Bon papier d’Hélène Matte. L’esprit du Show y est bien rendu.
    La construction du show s’est faite sur plusieurs modalités. C’est bien un spectacle de l’APA, une création collective qui s’est sans cesse modulée au fil de temps, pour la version finale à la Charpente des fauves.

    Merci.

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