Faible opposition à l’Hôtel de ville de Québec

Par Gilles Simard
Publié le 14 novembre 2025
Lors d’une conférence de presse contre le projet de l’îlot Dorchester au printemps 2025. Photo: DDP

Aussitôt achevée la dernière campagne électorale municipale, presque en même temps d’ailleurs que la première neige, voilà qu’un épais manteau de silence s’est posé sur la cité de Champlain, reléguant déjà loin derrière le souvenir de cette rocambolesque équipée collective dont les résultats à majorité absolue pour l’équipe Québec Forte et fière étaient (hélas) si prévisibles.

Maintenant que sont disparus les flonflons de la fanfare et les majorettes de la parade électorale, à peine si on a entendu ici et là quelques bruits de criquets, quelques voix discordantes pour s’inquiéter des dérives possibles de cette nouvelle administration qui nous a promis les yeux dans l’eau et la main sur le cœur de faire preuve d’humilité et d’être à l’écoute des citoyens. La belle affaire, toi ! Une image de la bonne Sainte-Anne avec ça ? !

Ahhhhhh ! Mais c’est qu’ils ont fière allure nos nouveaux élus. Ils sont jeunes, ils sont beaux, bien fringués, motivés, empathiques et fringants… Le hic toutefois c’est qu’en politique municipale, la bienveillance et la bonne foi ne suffisent pas toujours, et faute d’opposition crédible et sérieuse, les bons sentiments peuvent tellement se transformer en suffisance et en arrogance… Au nom du bien commun, pour sûr !

Une opposition solide pour les grands enjeux

Cela dit, il nous fallait une opposition solide, et ce pour mieux débattre, amender, améliorer et contre-proposer au besoin, et surtout, une opposition capable de porter haut et fort à l’hôtel de ville la voix de tous ceux et celles qui n’ont pas voté pour QFF (plus de 100, 000) et faire en sorte que les grands enjeux ne deviennent pas juste une question de consensus mou entre bénis oui oui et potiches en devenir.

Il nous la fallait cette opposition, mais hélas, à Québec et en banlieue, on a tellement eu peur de Sam the man et ses avatars, qu’on a donné une majorité quasi absolue à Marchand, congédiant du même coup Jackie Smith (TQ) et Claude Villeneuve (QA) au profit de Stéphane Lachance (RQ) le candidat anti-tramway, des chars et de la radio poubelle. Méchant faux dilemme, oui ! qui n’est pas sans nous rappeler, tellement Donald Trump a fait peur au monde, l’élection du « rassurant » et très libéral-conservateur Carney au détriment du Bloc Québécois. La peur, toi, chose… Ah ! Misère… La peur ! Mais qu’en sera-t-il au prochain référendum ? Allons-nous là aussi nous écraser de peur ?

Qui osera dire non à Marchand ?

Autrement, j’appuyais ouvertement Transition-Québec et la non-réponse de la population à son endroit m’a énormément déçu. Ça ne pouvait pas être pire. Pour moi, compte tenu des grands enjeux de la ville et sa banlieue — le tramway, le logement, l’itinérance, le transport collectif, la densification urbaine, le Port, la qualité de l’air en basse-ville, la mobilité, etc. — il était évident (et ça l’est encore) que le seul parti, la seule équipe capable d’amener une contrepartie valable et viable, originale et inspirante, était Transition-Québec, cette jeune formation écologique de gauche et un peu « flyée », avec ses Jackie Smith, Marjorie Champagne, Micha Horswill et les autres de la sympathique bande. Tout ce beau monde et quelques membres du clan Villeneuve pourquoi pas ? !

Sans opposition sérieuse, qu’en sera-t-il maintenant de cette nouvelle politique de densification « douce » de la Ville avec comme entrée en matière l’Îlot Dorchester cédée aux frères Trudel pour leur projet de tour-hôtel pharaonique de dix-sept étages et aussi l’érection de tours à condos sur la Grande-Allée ? Qui défendra maintenant la signature visuelle de cette ville unique et historique qu’est Québec et qu’on s’apprête à livrer à l’appétit des promoteurs ? Et qu’en sera-t-il de l’agrandissement du Port ? Et du sort de l’incinérateur voisin ?

Et de la qualité de l’air dans Limoilou ?

Mais oui ! Qui donc osera s’objecter au maire Marchand comme le firent jadis (1990) les Winnie Fhron, Réjean Lemoine, Alain Delwaide et Donald Baillargeon face à un maire Jean-Paul L’Allier du Rassemblement Populaire fraîchement élu qui voulait planter un hôtel Sheraton en lieu et place du Patro Saint-Vincent-de-Paul dans la côte d’Abraham ?

Un contre-pouvoir efficace, oui, mais comment ?

En terminant, j’insiste, qui osera dire non à l’exécutif de QFF pour s’opposer à des plans qui seraient trop inquiétants ou trop fumeux ?Stéphane Lachance et sa mirobolante équipe de deux ? Les sociétés de développement commercial ? Les fabriques de paroisses ? Les Chevaliers de Colomb ? Les organismes socioculturels qui dépendent des subventions de la ville ? Poser la question, c’est y répondre, n’est-ce pas ? !

Certes, Transition-Québec (ce qui en reste) et comme à leur habitude les coalitions telles la Table citoyenne du Littoral Est, les comités de citoyens-nes, les groupes populaires et communautaires, certains conseils de quartier et syndicats de même que certains médias traditionnels ou communautaire (comme Droit de parole) et aussi les réseaux sociaux, tout ce beau monde continuera de veiller au grain et dénoncera au besoin, mais sera-ce assez comme opposition porteuse de résultats ? Là encore, permettez-moi d’en douter.

Tout ça pour dire qu’à Québec, et cela sans nécessairement verser dans le municipalisme libertaire des Durand-Folco, Bookchin et cie, il nous faut absolument trouver d’autres moyens pour exercer un contre-pouvoir efficace et profitable. Sinon … Sinon, eh bien, ces quatre nouvelles années de QFF au pouvoir seront une éternité, et Dieu sait que c’est long longtemps, l’éternité … Surtout vers la fin.

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