
Beaucoup de choses en ce bas monde me dérangent, m’horripilent ou me sidèrent.
Par exemple, ces locataires du centre-ville néanmoins propriétaires d’un chien (ou d’un chat qui jappe), qui imposent donc au voisinage une bête tonitruante productrice d’étrons malodorants.
Par exemple derechef, ces grands dadais (et grandes dadaises) détenteurs de cellulaire qui, dans le bus, s’affalent dans le premier siège disponible : généralement tout en avant, donc au détriment des personnes visiblement à mobilité réduite, et ce, malgré la présence d’affichettes appelant au civisme.
Mais par les temps qui courent, c’est très certainement l’apparition de Sam Hamad sur la scène municipale qui trône au sommet de mes objets de sidération.
Parmi les opposants au maire sortant Bruno Marchand, Sam Hamad, député libéral de Louis-Hébert pendant 14 ans, de 2003 à 2017, et ministre (des Transports, entre autres) dans les gouvernements de Jean Charest et de Philippe-Austérité Couillard, fait figure de vedette. À telle enseigne que des médias comme RDI et LCN ont offert des face-à-face Hamad-Marchand.
Mais ladite vedette en est une d’un autre temps. Sam Hamad est un politicien à l’ancienne, façon Jean Pelletier, Denis Coderre ou Régis Labeaume, qui se caractérise par un mélange, à doses variables, de populisme, de démagogie et de désinformation. Ainsi pourquoi diantre son organisation s’est-elle fourvoyée, en début de campagne, en illustrant la congestion routière à Québec avec des photos prises à Montréal? Comme si on n’était pas capables, dans la région, de créer nos propres embouteillages!
Vendu mon char
Ce n’est pas, pourtant, que je suis particulièrement engouée de Bruno Marchand. Pour dire le vrai, la soixantenaire à canne que je suis maintenant se reconnaît bien peu dans la mobilité façon Marchand, soit la promotion tous azimuts du vélo et de la marche à pied sans trop d’aménagements susceptibles d’aider la population piétonne moins mobile. En somme, avec Bruno Marchand, il est facile de se sentir trop vieux.
En revanche, il est difficile de ne pas voir chez Sam Hamad un côté vendeur de chars usagés. Du genre à vous dire : « Ce char-là, ma petite madame, ça appartenait à un curé pis c’est jamais sorti l’hiver. » Ne vous en déplaise, Sam Hamad, critiqué pour ses liens avec le sémillant Marc-Yvan Côté, ministre libéral de la Santé et des Services sociaux (de 1989 à 1994) affublé du surnom bon enfant de « beu de Matane » puis organisateur politique, a été soupçonné d’éthique « lousse ». Oui, « seulement » soupçonné, c’est vrai. N’empêche, ça fait désordre.
En 1989 aussi, un ancien ministre libéral avait brigué la mairie de Québec : Jean-Paul L’Allier. Ironiquement, il l’a emporté, après s’être engagé dans le camp du OUI lors du référendum de 1980, sur un ex-ministre péquiste : Jean-François Bertrand. Maire pendant 16 ans, L’Allier aura dépassé, en longévité à ce poste, les Gilles Lamontagne (1965-1977), Jean Pelletier (1977-1989) et Régis Labeaume (2007-2021). Et se sera sans conteste montré un homme de vision, ce dont témoignent la revitalisation du centre-ville (Saint-Roch, en particulier), la dépollution de la rivière Saint-Charles, la promotion de la démocratie municipale (avec les conseils de quartier), la création de l’Organisation des villes du patrimoine mondial…
Selon un sondage réalisé par la firme Segma Recherche pour le compte de Radio-Canada et Le Soleil, à deux semaines du scrutin, Bruno Marchand récoltait 40 % des intentions de vote : une avance quasi insurmontable sur Stéphane Lachance (16 %) et Sam Hamad (14 %), ses deux plus proches adversaires. Tous deux sont aussi de farouches opposants au tramway. Mais la question du tramway est depuis longtemps une matière hautement inflammable, détournée par l’idéologie au détriment de l’enjeu réel qui est celui, complexe, de la mobilité, c’est-à-dire des déplacements dans la ville, que l’on soit à pied, à vélo ou en voiture, et que l’on soit jeune ou moins jeune.
La complexité est d’ailleurs ce qui caractérise la réalité des administrations municipales, obligées de faire face à des problèmes (crise du logement, itinérance, changement climatique, etc.) qui ne se résolvent pas à coups d’augmentations de taxes ou des effectifs policiers. Et c’est quelque chose que savent la grande majorité des personnes en âge de voter. Cela n’empêche pas Québec d’abord, avec à sa tête Claude Villeneuve (actuellement chef de l’opposition officielle à Québec) d’offrir aux personnes de 65 ans ou plus l’adhésion gratuite à la FADOQ, la Fédération de l’âge d’or du Québec. Misère!