Cuba, son charme et sa fierté

Par Gilles Bérubé
Publié le 17 avril 2020
Maleon, Baie de La Havane. Photo: Gilles Bérubé

Quel plaisir immense de me retrouver de nouveau à La Havane après treize ans d’absence en ce début d’année 2020, avant le début de la pandémie de la COVID-19.

En 2003, j’y avais présenté une exposition de photos accompagnées des poèmes de Francine Vallée au Teatro Nacional de Cuba, Place de la Révolution, sous le thème «Images du Québec». J’avais même poussé l’audace en offrant une photo de René Lévesque à Fidel Castro. Le charme de cette merveilleuse capitale opère toujours…

Vidal, mon chauffeur, se faufile dans la ville comme un serpent dans sa Dodge rouge 57. Il emprunte une route principale en sortant de l’aéroport José-Marti, puis plusieurs rues secondaires.

On dépasse cyclistes, motos, scooters, bixi-taxis, et de vieilles Cadillac, Chevrolet, Buick, Ford, Pontiac, Fiat, Peugeot et Renault de toutes les couleurs et dans toute leur splendeur des années, quarante, cinquante et même certaines, plus rares, des années vingt. On arrive enfin à la maison de mon ami, rue Florida, dans un quartier populaire et très coloré. Le soleil brille en cette mi-février, et la chaleur est bienvenue.

Les Cubains sont fiers, et leurs antiques voitures en font foi. Elles sont rutilantes et témoignent, plus que partout au monde, d’une grande époque. Inventifs, ceux-ci fabriquent de nouvelles pièces et adaptent même des moteurs récents de Nissan ou d’autres marques dans leurs vieilles voitures yankees.

Ils roulent, au grand plaisir des nombreux touristes venus se tremper dans cette atmosphère unique où l’on a une impression de liberté individuelle. Par exemple, vous pouvez fumer une cigarette n’importe où, même à l’aéroport. Vous n’êtes pas obligé de porter un casque à moto ni la ceinture en voiture. Vous pouvez stationner l’auto où vous voulez en échange d’un sourire ou d’un peso ou moins pour la personne en charge. Viva Cuba!

Cependant, la propagande américaine contre la perle des Caraïbes et du successeur de Fidel et de Raoul Castro, Miguel Diaz-Canel, semble plus forte que jamais. Obama avait fait un grand effort de rapprochement lors de sa visite officielle en 2016, mais Trump a rapidement refermé la porte après son élection et maintient la pression sur les pays amis de Cuba depuis, de sorte que les cargos étrangers ne peuvent mouiller dans l’ile, elle dont la capitale fête cette année ses 500 ans.

Les bateaux de croisière doivent aussi passer au large. J’en ai vu un filer derrière le fort El Moro, conçu par l’architecte italien Juan Bautista Antonelli il y a quatre siècles pour protéger la ville des assauts contre des pirates et des corsaires anglais et des autres flibustiers qui attaquaient sans cesse la ville espagnole.

Fondée en 1519 par Diego Velasquez sous le nom de San Cristobal de La Habana, elle frappe par la beauté de son architecture, de ses vieux édifices aux riches couleurs pastels et de certaines artères comme le Malecon, au bout duquel on découvre le somptueux Hôtel National, le plus grand et fastueux de la capitale.

C’est dans ce mythique lieu que se réunissaient les vedettes internationales mêlées aux gangsters pour des festivités grandioses pendant plus d’une décade jusqu’à la révolution cubaine, le premier janvier 1959. Par ailleurs, un héros méconnu de chez nous, Pierre Le Moyne d’Iberville, fondateur de la Louisiane, y a sa statue de bronze dans la baie depuis 1999, cadeau du gouvernement du Québec.

Il est mort en1706 sur son bateau dans le port après une rencontre avec un général espagnol qui visait à créer une alliance avec les Espagnols contre l’Angleterre. Il aurait été empoisonné en même temps que le général par une conspiration des Anglais.

Malgré tout, le pays des cigares a célébré l’an passé les soixante ans de sa révolution socialiste, une inspiration pour la gauche affaiblie d’Amérique du Sud. Il a bataillé résolument avant et après l’embargo de 1962, mais aujourd’hui plus que jamais, les difficultés et les défis pour survivre et se maintenir sont immenses pour ses dirigeants.

L’isolement géographique et politique doublé d’une crise économique n’aident en rien l’arrivée de denrées et des produits de nécessité sur les tablettes des magasins devant lesquels on fait la file. Et bien évidemment, l’arrivée de la COVID-19 est une catastrophe pour l’industrie touristique.

Qu’importe, les Cubains sont résilients, restent souriants et courtois et ils se débrouillent comme toujours avec le marché parallèle pour obtenir ce dont ils ont besoin. Beaucoup peuvent aussi, comme les Haïtiens, compter sur la diaspora de Miami pour obtenir des fonds. Et souvent, ils nous lancent en boutade, pour clore une discussion, les paroles mémorables d’Ernesto « Che » Guevara sur les champs de bataille à Santa Clara contre les militaires de l’ex-dictateur Fulgencio BatistaL« Hasta la victoria siempre! »

Commentaires

  1. J’ai toujours un petit battement au cœur quand t’on parle de Cuba. J’y passe mes hivers depuis plus de 30 ans. Vous imaginez que je connais Cuba sous toutes ses coutumes, ses rythmes, ses rires et ses peines. À se demander comment son voisin géant lui veut tant de misères. Il serait si simple de développer une collaboration à saveur d’humanité. Je vous assure que tous y serais gagnant. Mais la cupidité rend fou.
    Mon message est surtout pour vous exprimé ma grande surprise et ma fierté de voir sur la place  »Plaza Vieja » une exposition de photos de l’hiver au Québec, accrochée au grillage entourant la fontaine au centre de ce lieu historique. Je me souvient que c’était l’œuvre d’un Québecois. J’ai depuis perdu les photos et le nom de l’auteur.
    Grande joie de vous lire. Cela me ramène au chaud sentiment que j’ai pour se peuple…

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