«On vous a à l’œil. On va vous écraser comme une punaise.»

Par Richard Amiot
Publié le 13 mai 2019

Ces paroles terribles apparues dans sa messagerie ont inspiré un livre à la professeure Dominique Payette1 et lui en ont fourni le titre, Les brutes et la punaise, paru chez Lux en avril 2019. La punaise, c’est elle; les brutes, ce sont les auditeurs, des québécois et des québécoises2 comme vous et moi. Enfin, pas tout à fait.

Moi, je ne connais pas les radios-poubelles de Québec. Je ne les ai jamais écoutées. D’ailleurs, ceux qui s’en plaignent, pourquoi les écoutent-ils?

Aussi la professeure Dominique Payette a-t-elle fait œuvre utile, pour les québécois ignorants comme moi ou pour les montréalais qui s’interrogent encore sur le Mystère Québec, en dévoilant les arcanes de cette arme de pollution intellectuelle massive que constitue l’industrie des radios d’opinion de la Vieille Capitale. C’est la professeure Payette qui les nomme ainsi : « radios d’opinion ». Je la trouve bien polie. Radios-poubelles, cela leur convient bien mieux.

Je soupçonne qu’il n’y a pas beaucoup d’aficionados des radios-poubelles parmi les lecteurs de Droit de parole. À entendre les conversations de leurs concitoyens, ils doivent parfois avoir l’impression de vivre ailleurs qu’à Québec, là où elles n’exercent pas leur quasi-monopole sur l’opinion publique. On connaît les Fillion, Arthur et Doc Mailloux, pour leurs démêlés avec la justice. Mais qui connaît les Monette, Maurais – vite, je tourne les pages pour retrouver les noms. Ah! Voilà – Sylvain Bouchard, Stéphane Dupont, Josey Arsenault… drôle de nom. Il ou elle vient d’où? Il y a aussi les dénommés Jérôme Landry, Denis Gravel et Roby Morault. J’en oublie, mais la professeure Payette ne les a peut-être pas tous recensés dans son livre. Duhaime, c’est pas pareil, il fait de la politique, comme son acolyte Nathalie Normandeau.

Nous voilà désormais en terrain connu, où règnent les leaders d’opinion menant la politique dans la Vieille Capitale et ses banlieues, terrain connu mais miné pas leur mauvaise foi, leurs mensonges, le mépris et la haine qu’ils professent pour leurs semblables – oui, oui, ils sont humains. Comment un grand catholique comme Louis Audet, propriétaire de Cogeco, peut-il embaucher des animateurs- journalistes dont les propos contredisent si brutalement les préceptes chrétiens? Mystère! Mais l’argent n’a pas d’odeur. L’argent, parce que ces radios en ramassent des pelles à Québec. Les auditeurs n’ont guère le choix de les écouter s’ils n’aiment pas Radio-Canada, alors que les radios s’adressent à des clientèles captives, en voiture ou au travail.

Dominique Payette décrit bien le procédé par lequel elles opèrent toutes, en six petits chapitres exposant leurs mensonges. Elle relève par exemple l’idée selon laquelle les pays musulmans n’accueillent pas de réfugiés des guerres civiles au Moyen-Orient. En fait, un pays pauvre comme la Jordanie en accueille 3 millions et la Turquie, guère plus riche, un million. Elle évoque même leurs appels au meurtre (des assistés sociaux qu’on devrait « gazer »), elle expose leurs cibles de prédilection : les femmes, les écologistes, les groupes communautaires, les Autochtones, les pauvres; explicitant enfin leurs méthodes qui confinent au terrorisme intellectuel et relèvent de la plus pure propagande politique, sans qu’aucune autorité publique ni aucun politicien n’ose les remettre à leur place.

Enfin, soulignons que ce livre n’aurait pas été possible sans le groupe anonyme Sortons les poubelles, dont les membres dévoués se sacrifient pour écouter toutes les énormités proférées par les animateurs des radios-poubelles et en relever toutes les faussetés et les charges haineuses. Contre qui? les québécois et les québécoises.

1- Dominique Payette a été journaliste à Radio-Canada et Télé-Québec. Elle enseigne à l’Université Laval. Elle est l’auteure, en 2015, du rapport L’information à Québec, un enjeu capital, qui lui a mérité la menace évoquée en titre.
2- Les gentilés de ville comme québécois et québécoise ou montréalais et montréalaises s’écrivent avec une minuscule initiale. Seuls les gentilés de pays d’états fédéraux ou province s’écrivent avec une majuscule

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