Promoteurs et patrimoine à Québec : que cachent les «fondations»?

Par Edith Coulombe, citoyenne (en colère)
Publié le 15 janvier 2019
Québec vue des terres des Sœurs de la Charité, février 2019. Photo: Gilles Bérubé

Je réfléchis depuis quelques temps aux motivations réelles des entrepreneurs et gens d’affaires de tous genres, qui portent haut leurs fondations de bienfaisance et de protection des valeurs humaines, culturelles ou philanthropiques, entre autres.

Ces belles missions, bien véhiculées dans les médias et lors d’événements publics, semblent cacher trop régulièrement d’autres intentions, celles-ci moins désintéressées.

Ayant consulté le site internet de la fondation Famille Jules-Dallaire, à titre d’exemple, on peut y lire : « …avec une approche axée sur la dignité humaine, nous nous impliquons directement dans la gestion des œuvres que nous soutenons afin d’en assurer  la pérennité, tout en préservant le patrimoine culturel de la ville de Québec. »

Les Terres des sœurs de la Charité

À cet effet, je m’explique mal pourquoi l’homme d’affaires Michel Dallaire considère qu’il peut morceler les terres des sœurs de la Charité;  celles-ci font partie de l’ensemble patrimonial acquis il y a quelques années par sa fondation. Ces terres constituent un bien unique du territoire de la ville de Québec, n’ayant jamais été foulées par l’homme, autre que pour l’agriculture. Des experts, d’aussi loin que l’Europe, ont garanti que toute construction sur ces terres leur enlèverait leur caractère patrimonial.

Étant donné le courant mondial qui prône l’agriculture urbaine et de proximité afin de protéger l’environnement, pourquoi notre maire insiste-t-il, de concert avec la Fondation Jules-Dallaire, pour détruire ce qui ferait un exemple idéal de réelle protection du patrimoine et de vision d’avenir? Pourquoi Régis Labaume et Michel Dallaire ne saisissent-ils pas l’opportunité qu’ils ont de faire l’Histoire en poursuivant vraiment la mission des sœurs de la Charité?

J’exhorte la Commission de protection du territoire agricole à ne pas céder devant l’insistance de ces personnes. Les terres des sœurs de la Charité sont un bien culturel qui doit rester intact, comme tant de citoyens et d’autorités le demandent. Et en garder leur fonction de nourrir les Québécois.

L’Institut Mallet dans le Vieux-Québec

Quant au complexe acquis des sœurs en ville, l’Institut Mallet, administré par cet homme d’affaires, s’entend à « …protéger le caractère architectural de la chapelle et à maintenir la vocation de ce lieu historique où est servie une soupe populaire depuis un siècle. » Ceci est fort louable. Néanmoins depuis bien des années personne n’a accès à cette chapelle si magnifique et bien préservée. Sera-t-elle accessible bientôt, pour que l’on puisse vraiment en profiter et que l’ensemble du public contribue à son rayonnement?

Et qu’arrivera-t-il aux autres bâtiments de ce complexe exceptionnel, comme ceux des services, de la chaufferie, du foyer Nazareth? Ceux-là ne sont aucunement mentionnés dans l’explication du site internet. Un bâtiment patrimonial n’a de sens que s’il demeure dans son contexte d’origine. Une fois morcelé, ce lieu historique perd son sens, aux dires de bien des spécialistes qui se sont prononcés sur certains projets d’habitation ou autres intentions, à Sillery, sur la Côte d’Abraham, par exemple.

Avec toutes ces constructions dans le secteur de place d’Youville, quel sera désormais le vrai paysage patrimonial du Vieux-Québec? Finalement, le titre de Vieux-Québec comme «patrimoine mondial», cela veut dire quoi quand les citoyens doivent se battre contre leur propre administration municipale pour conserver le patrimoine bâti?

Le Phare

Aussi, est-ce que notre maire pense que les cinq millions de touristes viendront pour admirer le projet Le Phare ? Que ce sera un beau complément à notre patrimoine architectural? Certainement pas, ce projet ayant été décrié comme passé date et utopique par nombre de spécialistes. Le monde regorge de projets de ce genre et surtout, porte la défiguration du secteur des ponts à son comble. La porte d’entrée de la capitale…Cela fait mal à l’environnement et au patrimoine paysager quand on constate le comportement de sourde oreille de nos élus, de concert avec ces entrepreneurs.

La fondation Dallaire

J’invite ces gens à devenir plus conscients de leurs fonctions et leurs engagements. Tout part de bonnes intentions. La fondation Jules-Dallaire donne d’une main pour installer la Porte Sainte, rajeunir les patros Roc-Amadour, maintenir la soupe populaire; elle a même acheté la Maison Dauphine pour les jeunes. Bravo! Mais cela ne veut pas dire que de l’autre main, les entreprises connexes à cette fondation ont le droit d’ajuster ces territoires et bâtiments comme bon leur semble, sans aucune considération pour les multiples personnes qui souhaitent le maintien intact de ces entités, au nom du patrimoine culturel, tel qu’indiqué par la fondation Jules-Dallaire. Tout ceci au nom de profits plutôt personnels!

Avec l’accord des autorités?

Arrêtez de jouer avec les mots et de balayer toutes les communications qui demandent la protection réelle de ce bien public que devraient devenir les terres de la Charité, entre autres. Cessez de vous cacher derrière les missions et les belles intentions de vos fondations, pour agir à votre guise. Gardez le cap sur la transparence et l’honnêteté envers le public et les institutions de vous achetez.

Que ces personnes se tiennent loin du monastère des Ursulines! Que jamais elles annoncent leur implication dans le futur de cet ensemble architectural unique. J’exhorte le Pôle culturel des Ursulines de s’adjoindre des vrais mécènes, comme pour le projet du monastère des Augustines, afin d’assurer une continuité digne de leur mission. Sinon nous pourrons conclure que le Vieux-Québec est géré par des entrepreneurs qui cachent leurs intentions derrière leurs fondations, avec l’accord de nos autorités.

 

 

 

 

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