Harper et la tentation sécuritaire

Publié le 3 février 2015
Stephen Harper à la chambre des communes à Ottawa. Photo: courtoisie
Stephen Harper à la chambre des communes à Ottawa.
Photo: courtoisie

Par Lynda Forgues

Les conservateurs de Stephen Harper avaient déjà prévu un troisième projet de loi liberticide avant Noël, mais ils craignaient que certaines des mesures proposées soient plutôt mal reçues. Harper profite maintenant de l’occasion offerte par l’attaque contre Charlie Hebdo; il a annoncé que son parti présenterait très tôt en 2015 de nouvelles propositions sur la sécurité nationale. Qu’en est-il ?

Plus de sécurité, moins de liberté

À la suite des attaques d’octobre dernier qui ont fait deux morts, le gouvernement s’est empressé d’adopter des lois (déjà prêtes depuis l’été 2014) augmentant considérablement le pouvoir des autorités en matière de sécurité nationale. La loi C-44 permet aux informateurs du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) de garder l’anonymat tout au long du processus, y compris lors des procès; le SCRS voit ses pouvoirs accrus tels que l’espionnage des Canadiens à l’étranger.

Personne n’étant contre la vertu, le gouvernement a utilisé le prétexte de la cyberintimidation pour donner plus de pouvoirs à la police, lui permettant d’obtenir des informations sur les comptes de téléphonie et d’internet des citoyen-nes. Mais comme Edward Snowden disait : « Aujourd’hui, ce ne sont pas les menaces terroristes qui sont le plus grand danger pour la démocratie. Mais bien la surveillance de masse. Les risques terroristes ne peuvent jamais affecter autant de monde que ce mécanisme de collecte généralisée d’informations. »

Pourquoi de nouvelles lois ?

La loi en vigueur exige qu’il y ait une crainte connue qu’une personne va commettre une infraction terroriste avant qu’un ordre de garder la paix soit imposé. La police doit respecter un certain seuil avant d’agir, avant d’imposer le mandat de paix. Le gouvernement cherche à abaisser le seuil dans sa prochaine loi. Cela permettra aux autorités d’empêcher quiconque d’embarquer, même s’il est connu que cette personne n’a aucun projet d’attaquer l’avion. Elle pourrait seulement, par exemple, vouloir participer à une manifestation contre un Sommet du G20 dans un autre pays… Sous prétexte de surveiller des suspects, on va surveiller tout le monde.

Plus de pouvoir de police

La nouvelle loi prévoit d’élargir les pouvoirs de la police, en matière d’arrestations et détentions préventives. Est-ce pour imiter les Britanniques et les Français qui pénalisent « l’incitation au terrorisme », ou même l’« encouragement » au terrorisme ? Harper promet : « des pouvoirs additionnels (…) pour identifier des menaces de terreur potentielles et faire des arrestations et d’autres actions ».

Nous connaissons Stephen Harper. Nous savons comment il agit de façon impitoyable même au sein du Parlement avec l’opposition, ou alors dans la société civile avec tous les groupes qu’ils soient écologistes, autochtones, scientifiques, féministes, syndicaux, etc. : réduction du financement, bavures, bâillon, atteintes à la réputation, propagande effrénée, muselière, enquêtes de l’ARC, prorogation, etc. Que pouvons-nous attendre d’un tel gouvernement sur le plan de la justice ? Il est tout de même ironique que la mort brutale de gens se réclamant de la liberté d’expression donne l’occasion aux conservateurs de la restreindre pour beaucoup d’autres.

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