Le promoteur de l’îlot Irving VS deux citoyens. Le jugement Legris: une défaite pour l’expression citoyenne

Publié le 15 septembre 2014

Par Marc Boutin

L'affiche du promoteur.
L’affiche du promoteur.
L'affiche des citoyens.
L’affiche des citoyens.

Le 21 mai dernier est tombé un jugement (dont la presse a fait peu état) qui pourrait faire jurisprudence, et ce au grand dam des citoyens qui oseront contester un projet immobilier jugé par eux monstrueux et/ou qui outrepasserait les règles du zonage.Résumé des faits.


Pendant le débat qui a précédé le référendum sur le changement au zonage que réclamait le promoteur GM Développement, ce dernier a fait parvenir une mise en demeure à deux résidants de la Rue Saint-Jean. Ceux-ci contestaient le projet en le qualifiant de monstrueux et en illustrant par un dessin sa disproportion par rapport à l’ensemble du Faubourg Saint-Jean sur une affiche diffusée dans les rues du quartier.
La mise en demeure enjoignait les résidants à retirer les dites affiches, jugées trompeuses par le promoteur, ce qui fut fait dans les jours qui ont suivi. Mais selon le promoteur, les gestes posés par ces résidants ayant provoqué la victoire du non au référendum, et ainsi freiné ses aspirations immobilières, son image auprès de l’opinion publique aurait été mise en cause. Il décide donc de poursuivre les résidants en leur réclamant 112 000 $ pour atteinte à sa réputation et 32 400 $ pour dommages exemplaires.
De leur côté, les résidants, astreints par le promoteur à se défendre en justice, plaident que l’action de celui-ci est abusive, qu’il s’agit d’une poursuite de type «bâillon» qui n’a pour but que de les faire taire dans le cadre d’une démarche démocratique et que l’affiche dont le demandeur (GM Développement) se servait pour faire la promotion de son projet, était encore plus trompeuse que la leur. Elle consistait, selon eux, en une perspective éloignée qui rapetissait l’édifice et sur laquelle il manquait un étage, le 10e où sont situés ventilateurs et ascenseurs. Les défendeurs considéraient donc que le promoteur devait assumer la totalité des frais.

La décision

Le juge Legris a renvoyé les deux parties dos à dos. Les résidants n’auront pas à payer les montants que leur réclamait le promoteur, mais chaque partie devra assumer ses frais.
À première vue, on peut penser qu’il s’agit d’une victoire pour les résidants. Il n’en est rien. Le promoteur savait bien que ses chances étaient minces de se faire payer. De toutes façon, tel n’était pas le but de l’opération, il n’en avait pas besoin pour vivre. Le but de l’opération était d’étouffer toute velléité d’opposition de la part des citoyens dans l’avenir en ce qui a trait aux opérations immobilières d’envergure, pour ne pas dire monstrueuses. Pour de simples citoyens, payer des frais d’avocats dans une telle affaire consiste à se priver de l’essentiel. Pour un promoteur, qui a à son service des avocats à temps plein, il ne s’agit que de faire travailler son monde.
Le système juridique semble ne pas vouloir que les citoyens se mêlent de leurs affaires et ainsi, il sert d’appui aux ambitions cachées de l’administration Labeaume qui avec ses PPU (projets particuliers d’urbanisme) cherche à enlever aux citoyens la possibilité de recourir aux référendum pour contester dans leurs quartiers les projets immobiliers disproportionnés.

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