Un membre de la Caisse populaire raconte

Publié le 21 décembre 2012

On voit Michel Desrochers de côté, presque de dos, bougeant les bras en parlant. Il semble être dans un local communautaire.

Par Michel Desrochers

J’ai maintenant 69 ans. Mon premier contact direct avec ma caisse fut à l’école élémentaire. Je déposais 5 ou 10 cents de temps à autre à la caisse scolaire. Plus âgé, j’ai été élu au c.a. de la Caisse Saint-Sauveur et j’y ai passé 29 ans. J’ai même représenté la caisse au c.a. d’une coopérative de services à domicile dont j’ai été secrétaire-trésorier pendant dix ans. Avec le Comité des citoyens et citoyennes nous avons mis sur pied plusieurs coopératives d’habitation.

Dans ces expériences, j’ai côtoyé de vrais coopérateurs. J’ai toujours été et je demeure un chaud partisan des Caisses populaires.

Je vous livre aujourd’hui quelques réflexions sans trop espérer qu’elles auront un effet sur la suite des événements. Qui sait ???

Une coopérative, c’est quoi ?

– Une coopérative est créée d’abord pour donner un ou des services à ses membres et ensuite seulement, pour faire des profits. Pour cette raison nous appelons les surplus des trop-perçus. C’est ce qui la distingue d’une banque. Une coopérative est en principe, une entreprise démocratique. Lorsqu’une décision affecte plusieurs de ses membres, les dirigeants devraient (même si la loi ne les y oblige pas toujours) les consulter.

– Il ne s’agit pas ici de savoir si la fréquentation du comptoir Saint-Sauveur a diminué mais plutôt de se demander si la fréquentation actuelle justifie son maintien. Mes observations démontrent que ladite fréquentation au comptoir était telle qu’elle justifiait le travail de deux caissiers ou caissières presque régulièrement. Avec 5000 opérations aux caisses par mois, si 1 personne effectue en moyenne 3 opérations, ça fait 1667 personnes. Pour 20 jours d’ouverture… 80 personnes par jour.

– Est-ce qu’un c.a. doit juger les membres et décider du bien-fondé des raisons qu’ils ont pour ainsi continuer à fréquenter le comptoir ?

– Est-ce que le c.a. a tenu compte que 23,5% des personnes du quartier ont un revenu personnel de 9 999,$ ou moins et, qu’une autre partie (33,5%) gagnent entre 10 000,$ et 19 999,$.

– Plusieurs des membres ne peuvent pas utiliser «Accès D » parce qu’ils ne peuvent pas se payer Internet. Certains autres membres ne savent pas lire et à peine compter. Une autre catégorie se situe dans les personnes âgées qui ont des difficultés de déplacement. Ces membres sont souvent des personnes qui sont fidèles à leur caisse depuis plus de cinquante ans. N’oublions pas que ce point de service dessert tous les membres des paroisses Sacré-Coeur, Saint-Sauveur, Notre-Dame-de-Grâce et une partie de la paroisse Jacques-Cartier.

– Est-ce que le maintien du comptoir Saint-Vallier met en péril la survie de la Caisse Centre-ville ? Les résultats financiers de notre caisse nous démontrent sans équivoque que ce n’est pas le cas. (14,5 millions de tropperçus avant ristournes en 2011). Avez-vous peur que plusieurs membres se plaignent de « la non fermeture du comptoir Saint-Sauveur ? »

– Est-ce que la Caisse Centre-ville pourrait afficher de plus grands profits si elle fermait le comptoir ? Nous savons que oui et que c’est la motivation principale de cette décision.

– Une caisse ne doit pas être le bras aveugle qui applique des normes arbitraires concoctées par de hauts fonctionnaires de la Fédération. Les caisses existaient
avant la Fédération. Cette dernière n’est qu’un instrument que nous avons créé pour être à notre service et non l’inverse.

Ma caisse ?

– Sans trop s’attarder à la chronologie des événements, nous avons observé qu’avec le désir de profits toujours plus grands, après avoir imposé des frais
à presque tous les services, on en est ensuite venu à vouloir capitaliser, à augmenter les réserves de toutes sortes. L’argent ainsi confié à la Fédération était placé par des spécialistes et nous procurait un rendement supérieur aux prêts hypothécaires. Une partie relativement importante de ces sommes a servi dans des placements d’une éthique douteuse. Ces opérations nous ont causé une perte de plusieurs millions. (Cinq millions pour notre seule caisse). Mais, ce n’était pas grave puisque nous avions des réserves.

– Entre-temps a commencé la ronde des fusions. Nous avons convaincu les assemblées générales de voter positivement cette nouvelle mesure de rentabilité. Nous leur promettions de maintenir les services dans leur secteur respectif en ajoutant parfois un petit « SI »… Cette tromperie a bien vite conduit aux fermetures des Comptoir Saint-Joseph, Sacré-Coeur et Jacques-Cartier.

Combien de membres auraient approuvés ces fusions s’ils en avaient su les conséquences ? Vous me direz peut-être qu’ils n’auraient pas compris que c’était pour leur bien ???

– La Caisse était un instrument social important. Il y avait des liens entre les membres et le personnel. Certains passaient même leur tour dans la file d’attente pour avoir « leur caissier/caissière »). Ces liens nous faisaient dire « ma caisse ». Enfin, nous sommes passés à la déshumanisation. Désormais, il y a le « guichet-robot »…

– En ce faisant, vous ne créez rien, vous ne faites qu’enrichir un peu plus les plus riches. Au contraire, vous démolissez ce que des générations de membres ont travaillé à construire.

– Je crois qu’il est possible de revenir sur une décision et d’envisager d’autres solutions si l’on garde en mémoire les véritables priorités de notre coopérative. Il faudrait dans un premier temps cesser de réagir en banquier qui ne vise qu’à donner plus de dividendes (que nous appelons ristournes).

– Comme la caisse ne garantit jamais le montant des trop-perçus, nous ne croyons pas qu’une grande quantité de membres vont se plaindre de la situation.

– Maintenant, on organise des spectacles, on donne des prix de présence d’une valeur certaine. Cela coûte à chaque année plusieurs dizaines de milliers de dollars (parfois plus de 100 000,$). Et, nous appelons cet exercice une assemblée générale.

Pour moi, cette décision prise en catimini au mois de juin dernier et non annoncée jusqu’à tout récemment, démontre ou la peur ou la honte. À tout le moins, elle indique un manque de respect envers les membres les moins favorisés. Elle me cause déception et tristesse.

Je ne reproche pas au directeur général de faire son travail. Je reproche aux membres du conseil d’administration de ne pas représenter avec courage les membres qui ont le plus besoin de leur soutien. Pour le moment, j’hésiterais beaucoup avant de vous qualifier de héros de la coopération.

 

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